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30 mai 2011

Moisson Rouge

Moisson Rouge / Dashiell Hammett / Quarto (Gallimard)

Publié en 4 épisodes en 1927 dans "Black Mask" : The cleaning of Poisonville, puis sous le titre Red Harvest en 1929. Publié en Frrançais en 1952 chez Gallimard, trad. P.J. Herr.

 

D_Hammett

Dashiell Hammett

Né le 28 mai 1894 à Baltimore et mort le 10 janvier 1961 à New York, Dashiell Hammett est un écrivain américain considéré comme le fondateur du roman noir. Son prénom original serait une déformation de "De Shille", nom d'un lointain aïeul Français.

Il était reconnu par des auteurs tels que Hemingway, Chandler ou Simenon comme ayant eu une influence considérable sur leur propre pratique. 

Il a également vu nombre de ses titres portés à l'écran avec un énorme succès, comme Le faucon maltais (incarné par Humphrey Bogart) évoqué par la couverture.

D'origine modeste, il a été employé comme détective pendant plusieurs années au sein de la fameuse agence Pinkerton, mais quand l'agence est contactée pour briser des grèves, il démissionne.

Il a tiré parti de sa connaissance du terrain pour des descriptions réalistes et précises du crime.

C'est un écrivain majeur et qui le savait: voici un extrait de lettre à Blanche Knopf, éditrice et amie, en 1928:

"Je suis l'une des rares personnes - s'il en reste encore - moyennement cultivées, qui prenne le roman policier au sérieux. Je ne veux pas dire que je prends nécessairement au sérieux ce que j'écris, ni ce qui est écrit par d'autres - je parle du roman policier comme genre."

Peu après l'entrée en guerre des Etats Unis, il se porte volontaire malgré son âge et sa santé précaire, et réussit à être incorporé. Cette période a sans doute été une des meilleures de sa vie, une des plus stables.

Le retour à la vie civile signifie aussi celui des anciens démons, alcoolisme et inconséquence dans la gestion de ses affaires, non payement des impôts concernant les droits d'auteur pendant toute la période militaire...

Après la gloire et les honneurs, vint la chute et le harcèlement de la part de l'administration et du FBI, pour qui il représentait un bouc émissaire idéal en raison de ses préoccupations sociales. Ses sympathies pour le parti communiste américain et surtout son refus obstiné de dénoncer ses camarades lui valent d'être soupçonné, après guerre, et en plein "Mac Carthysme", "d'activités anti-américaines", ce qui aboutit à une peine de prison et l'interdiction de toute adaptation de ses romans et brisa sa carrière.

Ce qu'en disait Raymond Chandler:

" Hammett a délogé le meurtre des palais vénitiens pour le "balancer" dans la rue; non pas que le crime doive y traîner indéfiniment mais il était bienvenu de se défaire le plus possible des chichis bourgeois d'Emily Post. Au cours de presque toute sa carrière il écrivit pour un public qui entretenait une attitude tranchée, agressive, envers la vie. Ce public ne redoutait pas l'immoralité du monde, celle-ci faisait partie de son quotidien. La violence ne le choquait pas, il la retrouvait en bas de chez lui. "

André Gide écrit en 1942 dans son journal :

J'ai enfin pu lire, avec un épatement considérable, voisin de l'admiration, La moisson rouge de D. Hammett, à défaut de La clé de verre, si fort recommandé par Malraux.

Cette admiration n'est vraiment pas partagée; Hammett écrit peu après :

" Je n'ai pas apprécié le commentaire de ton ami Gide sur Moisson Rouge tel que le rapporte Time, et j'aimerais bien que ce vieux pédé réserve pour lui et les types de son espèce sa verve lubrique."

Un peu rude de la part de Hammett tout de même, qui aurait visiblement préféré avoir d'autres admirateurs ...

Peut-on encore lire Dashjell Hammett ?

Marc Henry, dans le soir de Bruxelles, se pose la question en janvier dernier, à l'occasion du cinquantenaire de sa mort. ICI Il  conclut simplement que le plus grand risque, dans ce cas, est de ne plus supporter certains romans actuels, pleins d'artifices...

Le même journaliste apprécie le brio avec lequel Hammett situe l'état de décrépitude des institutions, sans avoir l'air d'y toucher:

" Le premier policier que je vis avait une barbe de trois jours. Le deuxième portait un uniforme défraîchi auquel manquaient deux boutons. Le troisième, planté au milieu du carrefour principal, à l'intersection de Broadway et Union Street, réglait la circulation, cigare au bec. Je cessai ensuite de les passer en revue. "

Moisson rouge

Publié en quatre épisodes chez Knopf éditions, sous le titre Personville, devenu Poisonville dans le texte, ce drame est inspiré par la ville de Butte, dans le Montana, petite ville minière. Dans un autre genre, ces villes perdues au milieu de nulle part rappellent celle de la jeunesse de Bob Dylan, Hibbing, ville minière du Minnesota, portant le nom de son fondateur, ou la petite ville de Tulsa en Oklahoma pour J. J. Cale.

Poisonville est littéralement "la ville d'un seul homme", qui la tient d'une main de fer. Des conflits sociaux très durs ont manqué lui faire perdre son pouvoir, alors il s'est acquoquiné avec des gangsters qui lui disputent son influence à présent. Phénomène récurrent dans la politique américaine semble-t-il.

Le héros est appelé pour "faire le ménage" dans cette ville. Membre d'une agence de détectives, il fera appel à deux collègues en renfort, et utilisera une méthode radicale et très classique.

Hammett s'est fondé sur ce qu'il a vu dans le Montana au temps de l'agence Pinkerton: propriétaires corrompus, notables locaux, grèves des mineurs, méthodes expéditives.

Ce que j'en pense

Hammett inaugure un style nerveux, rapide, précis, et ne s'attarde pas à détailler les états d'âme des personnages. Il n'est tout de même pas aussi froid, clinique, que Truman Capote dans De sang froid.

Certains détails ont été repris ailleurs, comme l'usage du pic à glace comme arme, "l'utilité" de la guerre des gangs pour éliminer la pègre, ou encore le personnage de l'avocat marron.

Un style percutant, efficace. Le début d'un nouveau style.

 

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